L’accroupi de l’acropole !
Un joli titre et bien fait pour montrer la grandeur de ce garçon (cet homme) dont j’ai parlé déjà ; son acropole est cette route nationale près de laquelle il travaille et vers laquelle on monte un peu ou beaucoup, toujours !
Chaque matin on s’attend un peu, pour, de loin, lever la main bien haut et saluer, secouer tout un sac de bonjours et puis, lui continuer de balayer et moi poursuivre vers le cyber, beaucoup moins cahin-caha que lui !
Il francophone autant que je fonophone et je ne sais donc pas par quel biais il a reçu cette voiturette d’infirme, de celles qui avancent en pédalant avec les bras, mais même mal adaptée à sa morphologie elle est un net progrès.
Mais, l’autre soir, j’attendais un ami au bord de la nationale ; presque 21 heures et une circulation dense encore ; dans un trou du trafic, quelques éclats de lumière et du bruit de conversation, apparaît devant moi cet homme invisible, sans lumière sur sa voiturette, poussé-accompagné par des amis ; à ma remarque sur le danger, imparable réponse « l’argent » !
Hier matin, je suis passé vers l’atelier où il était seul encore. Sa main est sèche et râpeuse, largement offerte. Un billet bleu a changé de poche, son visage s’est épanoui et son ‘merci’ venu du fond de son être a remué mon cœur, j’ai souri, tapoté sa machine et je suis parti.
Ce matin, comme en embuscade, il m’attendait à l’angle du trottoir ! Descendu de sa machine, il a levé l’avant, tourné la manivelle pour que je vois la lumière de son phare, fait le tour pour montrer à l’arrière le catadioptre qu’il a posé ! Et tout ça avec un regard lumineux, une bouche heureuse comme si c’est la fortune que je lui avais donnée et ce ‘Merci’ encore qui monte du fond des trippes et me remue le cœur !
Et dire que je n’ai d’autre nom à lui donner : « l’accroupi de l’acropole » ! Qu’importe, il n’est pas assis, il bouge, agit et ne tend pas la main pour mendier ! C’est bien haut, bien au dessus de ce goudron qu’il est et c’est avec pitié qu’il voit ceux qu’on dit « grands » avoir tout comme lui besoin d’aller au pot et en être honteux !
Quand il me dit merci et sourit, j’oublie tous ceux qui nous ignorent ou rient de nous !