CONVOIS OBITAIRES

Publié le par M. AFRYC

Assis aux fenêtres des voitures de tête, caméra à l’épaule, ils filment le cortège. Des motos-taxis (zems) et d’autres, encadrent les voitures, lentes, d’un cortège qui se veut majestueux.
Des voitures remplies comme on sait le faire ici ; soutanes blanches des fidèles du christianisme céleste (avec la charlotte assortie pour les dames); boubous ordinaires, jeans aussi ! Dans un break de l’église de la repentance, un cercueil dont je ne vois que le couvercle entre les épaules de son escorte.
Derrière, un fourgon pulse une musique de circonstance, des trompettes de la Nouvelle Orléans !

Seul avec son chauffeur, un autre cercueil suit dans un corbillard qui, par discrétion pour ceux qui le précèdent, a éteint sa sirène, mais laissé tourner son gyrophare.

D’autres voitures mortuaires, vides, les croisent ; le samedi serait-il jour d’enterrements ?

Oui ! Un autre convoi funèbre m’attend à la maison ! D’une araignée (soleil noir ?) linceulée de soie, que conduit une fourmillante foule de petites noires.

Des hommes jettent des pierres (des grosses) sous une haie ; on me dit qu’il y a un serpent !

Une sorte de rat longe la voie et sa queue fait un sillon dans le sable (mieux que le Petit Poucet !), puis il veut traverser, il hésite, avance, recule, me regarde comme s’il attendait que je lui ouvre le passage entre voitures et motos !
Un temps mort, il se lance et pédale de toutes ses pattes, une moto fonce, il semble passer à travers les rayons et finit sa traversée en cahotant sur trois pattes ; la moto est loin, pas de constat ; l’animal s’enfonce entre des plants de gombos.

Cérémonieux, le garde transporte la bête au bout d’une perche ; identification difficile mais cela ressemble à une couleuvre ; un des exécuteurs a emprunté une houe et désigne un rond d’herbe où faire la sépulture.
Un homme sentencieux affirme « tous les serpents peuvent mordre ! » ! C’est vrai, de même, tous les hommes peuvent penser, voire réfléchir, ça ne veut pas dire qu’ils le font tous, ou le font bien !

La haie, contre le mur de l’école, de grands arbres peuplés de dizaines de couples de tisserins, a été abattue ; les troncs et les plus grosses branches ont été débités en tronçons, les nids morts pendent au milieu des feuilles flétries, le silence est mortel en lieu de ce babil tonitruant qui ombrait le chœur des élèves récitant leurs leçons !
Où sont-ils allés, ces gros oiseaux jaune et noir qui s’effrayaient tant de mon passage quand ils cueillaient des fils déchirés aux palmes de la vons ?

Publié dans carte postale

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