Hier ! Choc, chute, attente.

Publié le par M. AFRYC

Sur le parvis de la station, un camion somnolait en attendant une roue ; sur la nationale, la circulation était assez fluide ; j'étais là et discutais (enfin, j'écoutais) avec un expatrié des avantages de la vie en Afrique par rapport à l'Europe, quand un bruit de tôle froissa son discours.


Une moto, bleue, glissait sur le bas-côté ; en avant d'elle une masse jaune pirouettait, roulait sur le sol et restait immobile ; plus en avant, une masse sombre disparaissait.


Un zémidjan, un taxi-moto, un jeune à ce qu'il m'a semblé, peut-être un de ces diplômés sans emploi qui a troqué son doctorat ou sa maîtrise contre une licence de taxi plus apte à lui assurer un revenu.


Il est là, allongé perpendiculaire à la voie, casquette blanche vissée sur le crâne au ras du goudron et le surtout jaune bien visible sur le sable gris.  Une voiture passe, une moto fait un écart, un fourgon marqué d'une croix rouge ne ralentit pas, d'autres voitures, d'autres motos passent dans un sens, dans l'autre.  Certains ralentissent assez pour mieux voir l'homme à terre, solitaire, et puis s'en vont !


Un zémidjan s'arrête enfin, un autre motard, d'autres motards, des piétons... on s'agglutine autour du corps comme mouches sur un déchet... une bonne-dame vient avec son éventail et fait de l'air !  Au sol on ne bouge pas !  Un zémidjan donne du sifflet et invite à circuler, mais des motos s'arrêtent le temps de voir et d'enfumer. 


Je songe à ce documentaire vu dimanche d'une famille d'hippopotames rendant hommage à un bœuf tué dans la nuit, le léchant puis s'allongeant autour de lui pour deux heures.  L'hommage aux défunts n'est-il pas considéré comme le début de la civilisation ?



Une bonne demi heure plus tard, un fourgon de pompiers, sirène geignarde, manœuvre et s'arrête, on en sort une civière, la foule à peine s'écarte de ‘son' blessé, la civière est chargée d'un corps inerte, un pompier coupe la circulation tandis qu'un autre amène la moto jusqu'à la station.  Gyrophare et sirènes n'aident pas vraiment à s'insérer dans la circulation.  Sirène hurlante, un transporteur de fonds quitte la banque, son blindage s'impose, il poursuit sa route.

Peu à peu les quelques dizaines de badauds reprennent leur voie.  Moi, j'étais déjà rentré, je parlais avec cet ami dont une plaie finit à peine de cicatriser au sommet du crâne, qui boite encore, ce spectacle remue des souvenirs en lui.  Je n'ai pas même essayé de traverser la route, je ne suis pas de taille à m'ouvrir une ‘fenêtre' et je n'étais plus nécessaire ensuite.

Publié dans carte postale

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